"Avant que la mort vienne,écrire encoreun poème
"Je me souviens qu'un été récent, alors que je
"Je me souviens qu'un été récent, alors que je marchais une fois de plus dans la campagne, le mot joie, comme traverse parfois le ciel un oiseau que l'on n'attendait pas et que l'on n'identifie pas aussitôt, m'est passé par l'esprit et m'a donné, lui aussi, de l'étonnement. Je crois que d'abord, une rime est venue lui faire écho, le mot soie; non pas tout à fait arbitrairement, parce que le ciel d'été à ce moment-là, brillant, léger et précieux comme il l'était, faisait penser à d'immenses bannières de soie qui auraient flotté au-dessus des arbres et des collines avec des reflets d'argent, tandis que les crapauds toujours invisibles faisaient s'élever du fossé profond, envahi de roseaux, des voix elles-mêmes, malgré leur force, comme argentées, lunaires. [...]"
Philippe Jaccottet, "A la lumière d'hiver", Poésie/Gallimard
"L'été : un éblouissement comme est la
"L'été : un éblouissement comme est la neige,
Celle qui vient légère et ne dure pas,
Et rien de nous n'en trouble la lumière
D'eau qui s'est condensée puis s'évapore.
D'où la sérénité, même l'allégresse
De ces instants qui savent que n'est rien.
Flocon la main qui avait pris le verre,
Autres flocons l'été, le ciel, les souvenirs."
Yves Bonnefoy, "Les planches courbes", Poésie/Gallimard
Chantez-moi l'étéAvec le vent et
Chantez-moi l'été
Avec le vent et l'oiseau
Sifflements plaintifs
Gloussements rigolos
Tsî-titi, iouli-iouli
Voiliers du ciel
Barbotes d'azur
Piou-piou, ouat-tiou-tiou
Passereaux et chardonnerets enchanteurs
Chantez-moi l'été
Turlit-turlu mélancolique
Tire-tire-la-bibite
Avec vos trilles enjouées ou plaintives
Gazouillez, glougloutez ou ricanez
Tchilup-tchilup, tchip-a-tchip
Roucoulez et coulez dans nos oreilles
Le temps d'un dernier été
Caquetez, crépitez et croassez
Dans les herbes chaudes gorgées de pollens
Julien Hoquet
La fenêtre condamnée
Chaque fin de semaine, une photo. Un poète, passant par-là, s'en inspirera peut-être. Ou peut-être pas.
Entre pierre et bois, une fenêtre condamnée au silence, guette. (fw)
Derrière la fenêtre fermée,j'imagine un déserteur
Derrière la fenêtre fermée,
j'imagine un déserteur de la vie buvant un café; noir de désespoir.
j'imagine des souvenirs prisonniers, fatigués d'être aussi souvent évoqués.
j'imagine le temps qui peine à suivre le tic-tac inlassable de l'horloge.
Derrière la fenêtre fermée,
j'imagine une vie qui se conjuguait au passé simple. Une vie ordinaire avec des éclats de rire et des mots doux ; une vie qui donnait la vie ; une vie qui aspirait le présent par la fenêtre grande ouverte.
Derrière la fenêtre fermée,
j'imagine des points de suspension qui attendent discrètement.
Vygo
"Parfois le jour comme une copie du jouret nos
"Parfois le jour comme une copie du jour
et nos vies comme des copies de la vie.
Quand il ne reste que très peu de choses à faire
apparemment très peu: regarder une fenêtre
dans les vitres d'une autre fenêtre, et le ciel
si gris et si terne sur les toits - et regarder encore
comme si tu allais découvrir le tout petit détail
qui montrerait que la feuille a glissé, que c'est l'original
qui se trouve maintenant devant toi."
Paul de Roux, "Entrevoir", Poésie/Gallimard
"Oh ! Ma fenêtre intérieure donnant sur un noir
"Oh ! Ma fenêtre intérieure donnant sur un noir d'âme tel une encre illisible
dans une existence passée comme une ligne hors de la page
[...]
Oh ! Mes fenêtres closes définitivement
je me suis tant penchée pour voir venir ceux que j'aimais
et toujours ils sont venus et moi de même espérée"
Claude Ber, "Sinon la transparence", Editions de l'Amandier