"Insérer les coins éclateurs dans les sillons.
"Insérer les coins éclateurs dans les sillons. Les taper avec la masse, doucement pour les enfoncer. "Faire sonner les coins"... Chaque note émise doit s'accorder à l'unisson, pour générer une tension égale dans la fissure naissante. Une épaisse "feuille" de granite, se détache alors. Extraire donc méticuleusement cette roche, deux mois dans l'année, à la belle saison. Transporter ces "lits" de pierre si dense, de plusieurs tonnes, en camion, jusqu'à l'atelier de transformation. Et façonner, d'étapes en étapes, de machine en machine, de mains en mains. Pour retrouver ensuite le granit pilier d'un pont, gargouille de l'église, croix à l'entrée d'un village, meule du moulin, tombe au coeur du cimetière, pavage dans une rue, sculpture ou monument sur une place, moellon d'une maison, plan de travail de sa cuisine ou contour de sa cheminée..."
Hélène Joly, "Voyage (s) en Millevaches..."
"Ils sont venus chez nous avec leurs seules
"Ils sont venus chez nous avec leurs seules mains,
Enfants déracinés d'une terre de misère,
Laissant loin le soleil, leur jeunesse et leur mère,
Pour, d'un bout de granit, faire naître un bout de pain.
[...]
Ils sont venus chez nous pour frapper sur la pierre
Leurs mains se sont usées sur tous nos monuments
Leur peau s'est crevassée sous l'ardeur de nos vents
Et leur sueur a séché au fond de nos carrières.
[...]"
Gérard Chaulet, cité par Gabrielle Thévenot, "Les hommes des carrières du Maupuy"
L'étang de Fransèches
"Madame de Breyves aimait ses étangs, miroirs
"Madame de Breyves aimait ses étangs, miroirs d'illusions du matin au soir, de l'hiver à l'été. [...] Envie de se baigner dans l'étang - glisser sous son couvercle de moire argentée, sentir contre sa chair la palpitation des hautes herbes, froisser, en nageant, la soie qui s'enroule autour des bras telle une caresse..."
Françoise Chandernagor, "L'Enfant des Lumières"
Vont-elles les prêles,pour une fois plus hautes
Suite à suivre pour un paysan "[...]Paysan, qui
Suite à suivre pour un paysan
"[...]
Paysan, qui mènes l'eau où tu veux. Qui trouves l'eau
qui la fais naître entre tes doigts sous la branche cornue.
Tu cures la fontaine, tu creuses le puits. Tu fermes la source
dans la pêcherie; et par le déversoir et par la bonde,
tu emmènes l'eau où tu veux -
L'eau libre, pourtant, et qui toujours descend,
et trouvera le moindre trou -
dont tu fais un miroir pour te garder le ciel,
entre les prés et les arbres, de l'étang et de la pêcherie.
Qui peut savoir l'eau comme toi, paysan ?
Tu ne gardes pas l'eau prisonnière, non. Mais tu la retiens un temps.
Tu la portes entre tes mains,
Pour en boire la terre et le ciel tout ensemble, jusqu'à ta bouche."
Marcelle Delpastre, "d'una lenga l'autra"
Voir le jour venir au monde,l'étang réfléchir les
L'étang de tête "J'ai lu un étangJe l'ai appris
L'étang de tête
"J'ai lu un étang
Je l'ai appris par coeur
Et je m'y suis plongé et replongé
Comme on goûte des yeux
Cela même qui nous dévore en vain
Depuis, l'étang c'est mon prie cieux
Ma lanterne des ombres
Le calque infini du regard noyé
Dans sa propre perte de vue
Où les sourcils froncés
Relèvent un coin de nuit entre deux reflets sobres
[...]"
André Duprat, "L'étang unique" (Editions Apeiron)
L'élan d'une passante Ce sera iciUn étang entouré
L'élan d'une passante
Ce sera ici
Un étang entouré de forêts
Une eau sombre, le reflet des arbres
Le reflet du ciel sur la surface lisse
Bien sûr on peut s'y tromper
Il suffit de se coucher dans l'herbe
Fermer les yeux
Songer aux miroirs
Tout peut s'inverser
Ce sera ici
Je ferai venir
Mes compagnons de route
Les visages de mes amis
Le sourire du voisin
Un matin en novembre
L'élan d'une passante
Son vélo de Hollande
Un étang ou la source des rêves
J'y ferai venir
Mes promeneurs des jours heureux
Toi, pieds nus sur la berge
Un matin de juillet
J'y ferai venir
Mes promeneurs de la nuit
Mes nuits sans plus personne
Les bruits du silence
Les mouvements sans forme
Les remous et les souffles
Multipliés entre l'étang, le ciel
La mémoire et les peurs.
J'y laisserai glisser
Ma main et mon visage
Le bras qui t'enlaçait
Mon corps tout entier
Enfin la vie mise à l'envers
Regarder vers le ciel le ciel qui se dérobe.
Jean-Paul Raffel, "Dormir la fenêtre ouverte"